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David
Le Breton

David Le Breton est né le 26 octobre 1953. Il est professeur en sociologie à l'Université de Strasbourg, membre de l'Institut universitaire de France et du laboratoire URA-CNRS "Cultures et société en Europe". Il est l'auteur, entre autres, de : L’Adieu au corps, Anthropologie de la douleur, Du Silence, La Saveur du monde et d'un roman noir, Mort sur la route.

L'Adieu au corps 
 

David Le Breton montre de manière radicale comment "l'extrême contemporain" condamne le corps, "si peu à la hauteur des avancées technologiques de ces dernières décennies", un corps qui de plus en plus est vécu comme un membre surnuméraire qu'il faudrait supprimer. Mettant le corps moderne en perspective, il montre que dans le discours scientifique contemporain, le corps est pensé comme une matière indifférente, simple support de la personne, à tel point "qu'il devient un objet à disposition sur lequel agir afin de l'améliorer, une matière première où se dilue l'identité personnelle et non plus une racine identitaire de l'homme."

Avec L'Adieu au corps, il met en relief que l'institution du corps en laboratoire public ou privé est bien l'une des données élémentaires de nos sociétés contemporaines et que le fantasme d'un corps libéré de ses anciennes pesanteurs naturelles aboutit à la création du mythe de "l’enfant parfait" fabriqué médicalement et estampillé d'un label exprimant sa qualité morphologique et génétique.



Editions Métailé - Collection Traversées

Paru le 01/01/1999

Imaginaires de la fin du corps

(extrait de l'article du paragraphe Résonance de la revue Le Passant Ordinaire)
 

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La navigation sur le Net ou l’immersion dans la réalité virtuelle donnent aux internautes le sentiment d’être rivé à un corps encombrant et inutile, qu’il faut nourrir, soigner, entretenir, etc., alors que la vie serait si heureuse sans ces tracas. La communication sans corps et sans visage du réseau favorise les identités multiples, la fragmentation du sujet engagé dans une série de rencontres virtuelles pour lesquelles il endosse à chaque fois un nom différent, voire même un âge, un sexe, une profession choisis selon les circonstances. Le corps devient une donnée facultative. La cyberculture est souvent décrite en termes religieux par ses adeptes comme un monde merveilleux ouvert aux « mutants » qui inventent un nouvel univers. Ce paradis du Net est nécessairement sans corps. Les jeux innombrables sur les identités ne sont possibles que grâce à la disparition du visage. Internet est une formidable institution du masque. Dissimulé sous une identité provisoire et réversible l’internaute ne craint plus de se regarder en face après une action quelconque. Nul ne sait qu’il est un chien. La cybersexualité réalise pleinement cet im-aginaire de la disparition du corps, et même de l’autre. Le texte se substitue au sexe, l’écran à la chair. L’érotisme atteint le stade suprême de l’hygiène avec le corps virtuel. Plus de crainte de sida ou de maladies sexuellement transmissibles, ni de harcèlement dans cette sexualité angélique où il est même possible, du fait de l’anonymat du Net, de revêtir sexe et état civil de son choix.
(...)

Le corps du transsexuel est un artefact technologique, une construction chirurgicale et hormonale, un façonnement plastique appuyé sur une volonté ferme. Joueur de son existence, le transsexuel entend revêtir pour un moment une apparence sexuelle conforme à son sentiment personnel. Son sexe d’élection est le fait de sa décision propre et non d’un destin anatomique, il vit à travers une volonté délibérée de provocation ou de jeu. Le transsexuel supprime les aspects trop significatifs de son ancienne corporéité pour aborder les signes sans équivoque de sa nouvelle apparence. Il se façonne au quotidien un corps toujours inachevé, toujours à conquérir grâce aux hormones et aux cosmétiques, grâce aux vêtements et au style de la présence. Féminité et masculinité, loin d’être l’évidence du rapport au monde, sont l’objet d’une production permanente par un usage approprié des signes, d’une redéfinition de soi, conformément au design corporel, ils deviennent un vaste champ d’expérimentation. La catégorie sexuelle du masculin est profondément remise en question. Volonté de conjurer la séparation, de ne plus faire du sexe (du latin secare : couper) ni un corps ni un destin mais une décision, et surtout de s’en affranchir pour s’inventer et se mettre soi-même au monde. Le transsexuel est un symbole presque caricatural du sentiment que le corps est une forme à transformer.

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